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Ultimes tensions pour un candidat Meilleur ouvrier de France couvreur

Il lui reste moins d’un mois. Stéphane Colinet, candidat au concours Meilleur ouvrier de France en couverture termine la maquette qu’il remettra au jury à la mi-décembre à Ingré (45). Ultimes tensions…

« Jusqu’à la dernière minute, c’est le suspense et toujours beaucoup de tension » confie Stéphane que l’on sent épuisé après une année consacrée à la réalisation de sa maquette. Candidat au concours un des Meilleurs ouvriers de France, Stéphane attend un peu comme une délivrance ce moment de la remise de son oeuvre. Mais à un mois de la remise, le travail lui semble encore loin d’être terminé, même si les doutes ont disparu de son esprit.

« Il n’y a plus vraiment de doutes à ce stade car il ne reste que des choses simples à faire, comme les terrassons, que l’on trouve sur les mansardes à Paris donc on connaît bien », indique le couvreur qui travaille chez Balas, une grosse entreprise de couverture à Paris.

Le candidat a réussi à obtenir un aménagement de son temps de travail par l’entreprise : deux jours sur les chantiers pour définir les tâches que réaliseront les compagnons de son équipe de travail, et le restant de la semaine, à l’atelier sur sa maquette.

« Après le concours ? j’ai plein d’activité chez moi que j’ai laissées en plan. Je ne prévois rien,…  je ne veux plus voir ma maquette car c’est épuisant, j’en ai rediscuté avec des proches qui ont passé le concours et qui ne veulent plus voir leur oeuvre pendant un long moment. Ce qui me tracasse, c’est de savoir où je l’exposerai car je veux que ça serve aux jeunes » ©Apiedoeuvre

Des problèmes de santé à gérer pour le candidat

« Ça a été un peu compliqué ces derniers temps car j’ai eu des problèmes de santé. Avec la fatigue, les douleurs liées aux vieilles fractures et chutes sont réapparues. J’ai eu trois côtes cassées lors d’une chute, avec un problème au bassin, et les disques en bas du dos sont usés. Je me fais suivre et vois régulièrement des ostéopathes et kiné, car les douleurs reprennent dès qu’il y a un changement de temps ou en cas de fatigue.

D’autres (mauvaises) surprises sont également intervenues, à un mois de la remise de la maquette : Stéphane n’a pas pu conserver le local prêté par un membre de sa famille. Il a dû déménager, avec sa maquette « sous le bras ». Un mal pour un bien, admet le candidat, et ce malgré un prix de location élevé et non prévu : il a pu retrouver par chance un grand local chauffé à côté du précédent atelier.

« Dans l’autre local, le box était non fermé sans plafond. Et là, le nouvel atelier est isolé avec plus d’éclairage et je peux me chauffer comme je veux. Cela aurait été plus facile pour moi de débuter dans ce local car cet hiver, je me suis retrouvé avec des températures négatives pour travailler … ».

Lire aussi : l’aventure d’un couvreur candidat au concours MOF

Le soutien d’un père pendant l’épreuve

L’épreuve a donc consisté à déplacer la maquette, la tracter avec des sangles et la faire rouler sur une chaussée un peu défoncée et gravillonnée, une épreuve vécue avec le père du candidat, Michel, venu aider et soutenir son fils.

« Mon père qui n’est pas du métier, est en effet venu m’aider ces dernières semaines : il est notamment intervenu sur la coupe de l’ardoise destinée à la tourelle car je n’avais pas le temps de m’en occuper, il l’a coupée et triée » précise Stéphane.

En ce moment, le père de Stéphane réfléchit à la création d’une protection en bois à placer en bas de la tourelle, lors de son prochain transport à Ingré (45) et de sa remise au jury. Elle pèse 700 kg et le plateau mesure 2,10 sur 2,20 m, ce qui n’est pas une mince affaire. Stéphane fera faire une housse par une couturière pour protéger les éléments saillants de l’oeuvre comme la tourelle.

Toujours des doutes et toujours à la recherche de la perfection…

Stéphane a connu des moments de doutes pendant toute l’épreuve. « Il nous arrive régulièrement de nous dire, « je ne peux pas passer », et c’est pour ça qu’il faut être bien accompagné, sinon, on est un peu dans le néant ; Il y a eu beaucoup de moments difficiles à gérer, des moments où on se retrouve seul la nuit dans l’atelier, à se poser des questions ». Le soutien de son épouse et de ses enfants a été bénéfique et capital pour notre couvreur…

Car dans ce concours d’excellence, tout doit être parfait ou presque. Rappelons que la note à obtenir pour devenir Meilleur ouvrier de France est de 18 sur 20, ce qui ne laisse place à aucune imprécision technique ou esthétique.

« Il faut que tous les éléments mis en place, zinc, cuivre, ardoises, tuiles et bardeaux aient le même aspect d’un côté et de l’autre… Si ce n’est pas le cas, il faut tout refaire. Quand on monte la noue, il peut y avoir une ardoise cassée et dans ce cas, il faut tout recommencer…il y a eu des moments difficiles pour la noue… » confie Stéphane.

Le parrain, un élément clé pour le concours

Adrien Beaugendre, 26 ans, lui-même titulaire du titre de Meilleur ouvrier de France a joué le rôle de parrain pour Stéphane. « Quand il passe me voir, souvent à l’improviste, il me dit si c’est bien ou s’il faut démonter. Il reste un moment, on discute, et ça me permet de repartir sur de bonnes bases. Parfois, il nous manque du recul en tant que candidat, donc, un parrain, c’est essentiel pour continuer à avancer… » confirme Stéphane

« Par exemple, sur le plomb, Adrien a vu trop de marques, des marques qui ne devaient pas être visibles. Il m’a dit de recommencer la pièce. Mon parrain est plus exigeant que moi, même si j’ai plus d’expérience-chantier que lui. Il a un regard pointu et complémentaire à celui que je porte sur la maquette. Parfois, il me dit que ça ne va pas. Mais il ne m’aide jamais à refaire la pièce ».

« Je me suis amusé finalement »

Quand la maquette sera livrée, ce sera le grand « ouf » pour Stéphane qui a hâte de voir les autres réalisations des concurrents : « Les autres candidats auront forcément eu une autre vision que la mienne. Ils auront sans doute utilisé d’autres matériaux, comme du bardeau vernis ou du bardeau coupé en losange, peut être… et certains auront utilisé du zinc avec des couleurs différentes. Tout est possible… »

Notre candidat se dit en effet très curieux et intéressé de savoir comment ils ont travaillé. « Je suis en train de découvrir mon métier, finalement. En tentant le concours, je voulais aussi apprendre à travailler d’autres matériaux… Je me suis amusé en définitive en me demandant quel matériau utiliser, quelle matrice réaliser. J’ai tout fait avec mes propres outils, dont certains que j’ai créés, et je suis devenu un peu menuisier, un peu charpentier, on se découvre d’autres aptitudes et c’est magique, cette expérience m’a beaucoup plu… » conclut-il.

La livraison de la maquette : la dernière « épreuve »

« Il faut un véhicule spécial et un chauffeur spécial, je vais le manager, lui passer de la pommade dans le dos et lui dire de faire très attention. J’ai trouvé la société de déménagement dans le Village de l’artisan, là ou je travaille sur ma maquette » explique notre candidat.

La zone artisanale compte en effet de nombreuses entreprises : un métallier, un charpentier, des livreurs. » il y a tout dans la zone, et ça m’évite de courir de gauche à droite, quand j’ai besoin de quelque chose… » précise Stéphane.

Ce dernier s’est renseigné auprès des loueurs de véhicules classiques, pour transporter sa maquette. Mais aucun n’avait de plateau à la bonne dimension. « J’ai contacté un déménageur qui est venu sur place voir ma maquette et qui m’a rassuré en me disant qu’il avait des plateaux de 2,50 m… ».

« Le jour J, je compte 2 heures de transport pour aller à Ingré, qui se situe à 70 km… Moi, je suivrai la maquette de très près en restant à l’intérieur du camion et je ne la quitterai pas du regard…  » conclut le candidat. Un candidat que l’on retrouvera le jour de la livraison de la maquette et après la réunion du jury…

Voir des vidéos et un document inédit sur Stéphane Colinet

Source : Apiedoeuvre.fr

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