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Frédéric Baron, Tailleur de pierre, retente le concours des meilleurs ouvriers de France

Frédéric Baron, 52 ans, tailleur de pierre, a décidé de retenter le concours des meilleurs ouvriers de France, après deux tentatives. Une aventure hors du commun pour « une oeuvre extraordinaire » à réaliser.

Frédéric Baron dirige une petite entreprise, une SARL, de deux salariés dans la Vienne, à mi-chemin entre Tours et Poitiers. Elle oeuvre dans le domaine de l’extraction de la pierre et dans la restauration du patrimoine.

« L’entreprise, la SARL Baron et Fils a été fondée en 1989 en association avec mon père, après l’ouverture d’une carrière à Sossay. L’extraction et la vente de pierre de tuffeau, la pierre régionale de Touraine, ont constitué pendant un certain temps l’activité principale de l’entreprise » explique Frédéric Baron dont l’entreprise a embauché jusqu’à 7 salariés.

Mais la vente de pierres a diminué pendant les années de crise et l’activité de restauration du patrimoine a permis de temporiser l’activité de l’entreprise.

Une envie du concours depuis 9 ans

Il y a 9 ans, Frédéric Baron se décide à tenter le concours des Meilleurs ouvriers de France. « Je me suis inscrit aux épreuves qualificatives puis ai été sélectionné. Malheureusement, quelques temps après, une tornade a fait tomber l’échafaudage de l’un de nos chantiers et deux de nos gars sont tombés. J’ai donc dû abandonner le concours » raconte le candidat.

Trois ans plus tard, le tailleur de pierre se réinscrit à l’édition suivante du concours. Il est à nouveau sélectionné après les épreuves qualificatives et se lance dans la réalisation de la pièce, un bénitier en pierre de tuffeau. « Je n’étais pas très loin du but car j’ai obtenu la note de 14,95. J’en étais vexé d’ailleurs, mais le président du jury m’a encouragé à retenter l’expérience » confie le tailleur de pierre.

Une 3e aventure très différente et un sujet complexe

Et ce sera une aventure très différente des précédentes que va vivre Frédéric Baron, avec la 26e édition de ce concours, une fois les épreuves qualificatives terminées : « Le sujet est prenant car il est vraiment complexe par rapport au précédent. On est ici davantage dans la sculpture » explique-t-il.

Le sujet du concours représente « une oeuvre extraordinaire » de l’avis du candidat (voir le sujet).  Il s’agit de deux colonnes de pierre enlacées et formant un noeud, surmontées d’un chapiteau et reposant sur une base, (voir le document). « Je suis tailleur et non pas sculpteur, alors j’ai dû me fier à mon instinct en réfléchissant à l’harmonie de l’oeuvre » indique Frédéric Baron.

 

 

Le sujet de l’épreuve s’inspire du monastère de Sainte-Sophie à Benevento en Italie (photo extraite du document officiel de l’épreuve)

De multiples questions…

En effet, si la partie basse n’a pas posé de problème majeur au tailleur de pierre, la question du noeud a davantage fait réfléchir le candidat qui s’est renseigné auprès de confrères. « Finalement, faute de consensus sur le sujet, j’y suis allé à l’instinct » résume-t-il.

De la même manière, concernant le chapiteau, le candidat s’est renseigné auprès d’une sculptrice qui lui a apporté quelques clés sur les canons de beauté en la matière. « Il faut surtout trouver une cohérence sur l’ornementation du chapiteau en matière de décors, par rapport au reste de l’ouvrage » précise Frédéric Baron.

Particularité du concours : la maquette sera livrée non terminée puisqu’une phase d’épreuves finales, dites en loge, qui permettra aux candidats d’achever leurs ouvrages. C’est le cas du chapiteau qui devra être terminé pendant les trois jours d’exécution finale, devant le jury réuni à Arras. De la même manière, une partie de la base devra être finie sur place.

Une pierre dure à travailler et non une pierre tendre

Quelles difficultés particulières a rencontré notre tailleur de pierre ?  « Je travaille habituellement le Tufeau, qui est une pierre tendre, et beaucoup plus rarement la pierre dure. Or, le sujet du concours doit être réalisé dans une nature de pierre marbrière ou avec un mixte de deux types de pierre. Pour ma part, j’ai opté pour un seul type de roche que j’ai dû aller récupérer dans la région de Bourges, dans le Cher.

Frédéric Baron est donc allé acheter quatre éléments de pierre, issues de la même carrière, La Celles, qui produit de « jolies pierres bien veinées ». Par ailleurs, le professionnel a dû s’équiper en matériel adapté à ce type de roche. « Mes filles m’ont offert un pistolet pneumatique pour l’occasion. Alors, avec un peu d’outillage, du savoir-faire et de l’expérience, je me suis dit que j’y arriverai quelle que soit la dureté de la pierre » ajoute-t-il.

Cette aventure représente cependant un véritable investissement, de l’avis de Frédéric Baron. Il faut en effet prendre en compte une inscription au concours de 100 euros, un déplacement sur Arras de deux jours avec le logement à prévoir pour la qualification, l’achat de la matière première (soit 500 euros) et de l’outillage adapté, mais aussi le transfert de la maquette à Arras, à la fin du concours, et à nouveau le séjour sur place pendant 3 jours.

Outre le coût financier, ce concours représente un gros investissement personnel en termes de temps consacré à la réalisation du sujet. La famille est mise à contribution et il faut bien gérer le temps passé dans l’entreprise pour assurer les obligations professionnelles et réaliser le concours

Des recherches et des déplacements dans des églises et abbayes

« Il faut se concentrer pour faire des recherches et se déplacer, afin de savoir quelle décoration convient le mieux sur la base des colonnes ou du chapiteau de type 12e siècle : griffe, feuillage, animaux ? » s’interroge Frédéric Barron qui est allé prospecter dans des abbayes et des églises pour mieux étudier son sujet.

Résultat : tous ses week-end ont été consacrés à la réalisation du sujet, ses contraintes professionnelles et la gestion de son entreprise ne lui laissant guère le temps en semaine de travailler sur son oeuvre. « J’ai réussi à prendre une semaine au mois d’août pour travailler sur le noeud » concède-t-il.

Pour s’habituer à travailler avec la pierre dure, Frédéric Baron a préféré réaliser le noeud plat dans le tuffeau, la pierre qu’il connaît bien, ce qui lui a permis de constater les anomalies rencontrées dans le tracé et de s’en servir comme base de travail.

Quelle est la motivation pour tenter ce concours si exigeant ? « Elle vient de loin, j’ai toujours aimé le travail bien fait. Mon père m’a appris le savoir-faire, le savoir-faire du beau travail, il réalisait des cheminées. Cela m’a guidé et m’a fait apprécier l’excellence du travail » répond notre candidat.

Sa fille titulaire du titre MAF tailleur de pierre

Par ailleurs, son entreprise n’a pas hésité à investir dans la formation des jeunes en embauchant des apprentis et cinq d’entre eux ont obtenu la médaille du Meilleur apprenti de France (MAF).

« La dernière en date à avoir obtenu la médaille de MAF en pierre de taille est ma fille » confie Frédéric Baron, fier du parcours de son ainée de 23 ans, qui après avoir obtenu son BP, est aujourd’hui tailleur de pierre dans une entreprise tourangelle. « Aujourd’hui, elle vient m’encourager et me supporter autant que mon épouse pendant mes heures de travail sur la pièce du concours » ajoute-il

Ce dernier précise qu’il a été contacté par le CFA local qui lui a demandé de participer au jury des CAP et des BP. « Cela a été une nouvelle expérience pour moi car j’ai appris à corriger des sujets plusieurs années de suite, ce qui permet de garantir la pérennité du métier et du savoir-faire. Mon père avait tenté le concours, mais il était seul, ce n’était pas facile et il avait dû arrêter… »

En fait, ce concours me permet également de savoir où j’en suis dans mon savoir-faire, de connaître la qualité de mes réalisations, et de me positionner par rapport à moi-même…

Un barnum en guise d’atelier

Son atelier, un barnum de 3 m x 3 m est installé dans la propriété de la demeure familiale, à l’extérieur. « Quand je travaille cela fait beaucoup de poussière. J’utilise des outils diamantés et du matériel électroportatif, ce qui génère une fine poussière qui envahit tout l’espace » D’où la nécessité de disposer d’un atelier soit très aéré soit équipé d’un système d’aspiration, ajoute Frédéric Baron. « Il est impératif de bien voir ce que nous faisons et j’utilise un petit ventilateur pour dégager la poussière ».

 

Source : Apiedoeuvre.fr

 

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