Quel devenir pour les métiers de main d’oeuvre ? Ils seront plus efficaces et « intelligents » grâce au travail collectif et collaboratif, selon Philippe Dresto, directeur du Collège des métiers chez les Compagnons du Devoir. Explications…
« Le numérique est seulement un outil, il faut juste l’intégrer dans son processus de travail. Le travail sera fait différemment bien sûr et c’est ça qui inquiète car on a du mal à se projeter. Les métiers survivront mais pas dans la forme que l’on connaît » explique Philippe Dresto,
Depuis le mois de juillet 2017, Philippe Dresto occupe, chez les Compagnons du Devoir, le poste de directeur du Collège des métiers en charge de la Recherche et des études (1). Sa mission consiste notamment à piloter les 16 instituts de métiers* de l’association et à épauler les 16 compagnons responsables de ces Instituts
Les instituts de métiers ? Ce sont des centres d’expertise animés par des Compagnons reconnus au sein de leur profession. Ces animateurs ou responsables d’Instituts, nommés pour une mission de 5 ans, deviennent salariés de l’association. Leurs missions s’articulent autour de 4 axes : rencontre, recherche, mémoire et formation. Avec un objectif commun à tous : transmettre et innover pour proposer les meilleures formations possibles.
« Nous devons nous assurer que la formation proposée aux jeunes soit la bonne. Pour cela, nous devons la remettre en cause avec des projections régulières et une vision à moyen et long terme afin d’étudier quelles seront, demain, les nouvelles compétences et les outils requis ».
La formation du jeune au cœur de la réflexion sur 16 métiers
Autre mission qui en découle pour Philippe Dresto : faire vivre le réseau, grâce notamment, à l’animation d’un conseil d’orientation annuel pour chaque métier. « Nous sommes dans une approche de créativité, avec une remise en cause des modèles existants et une projection permanente » insiste Philippe Dresto.
Diplômé d’une école de commerce et fort d’une expérience de 10 ans chez SPIE, Philippe Dresto voit un lien essentiel entre ces 16 instituts de métiers tous différents puisque certains concernent les métiers du goût, d’autres, les métiers du vivant ou encore ceux de la nature, du jardin et du paysage et enfin du Bâtiment …
« Le lien entre tous ces métiers, c’est d’abord le jeune que l’on doit former et accompagner tout au long de sa vie professionnelle. Et il doit être formé au mieux pour permettre son employabilité et conserver sa liberté de vivre son métier comme il le souhaite », rappelle Philippe Dresto qui ajoute : « C’est aussi la devise des Compagnons : « servir sans s’asservir ni se servir ».
La transition numérique impacte toutes les professions
Autre lien fort au cœur de tous les métiers, la transition numérique qui impacte toutes les professions. Quant à la transition énergétique, plus spécifique aux métiers du Bâtiment, elle impacte la filière d’amont en aval, dès la conception du Bâtiment jusqu’à la mise en oeuvre des produits.
« L’artisan doit être l’acteur de la transition numérique et ne pas la redouter », rappelle Philippe Dresto. Ainsi, dans les métiers de la charpente, les robots sont arrivés dans les ateliers et sur les chantiers, et pour autant, le métier n’a pas disparu, constate le responsable. Ces outils permettent à l’entreprise de gagner du temps en production et cette dernière peut en conséquence proposer davantage de services à ses clients.
« Il faut dédiaboliser les apparences, c’est une démarche qui correspond d’ailleurs à l’esprit Compagnon, car le jeune quitte son cocon une fois par an et connaît l’approche de la remise en cause. Ce n’est pas une démarche évidente car nous sommes conditionnés par ce que l’on vit sur le moment. Mais il faut apprendre à sortir la tête du sac ».
La révolution du travail collectif
La plus grande révolution, sera sans doute le travail collectif, estime le responsable. Grâce au travail collectif, on revisite la notion de propriété qu’il s’agisse des outils de travail, des ateliers, de la pièce ou du Bâtiment que l’on va créer.
Autre signe visible de cette logique : le développement de l’habitat participatif, qui séduit les futurs occupants de logements et permet de mêler les générations. On peut tout mixer intelligemment, dans la construction. Une tendance que l’on voit dans la conception des bâtiments qui n’hésitent pas à mixer les matériaux et les énergies, dans un objectif de performance.
La logique du « Travailler ensemble » peut apporter davantage d’efficacité, de gain de temps, d’économie et d’intelligence, résume Philippe Dresto. Et la transition numérique le permet beaucoup plus facilement. Il suffit que l’artisan devienne acteur de cette transition…
(1) Au total, l’équipe avec laquelle travaille le directeur du Collège des métiers compte 68 personnes, à raison de 15 responsables d’Institut, un ou deux chargés de mission par Institut ainsi que deux personnes en charge de la transition numérique et environnementale. S’y ajoutent une équipe pédagogique de 10 ingénieurs généralistes et spécialistes et une coordinatrice en charge de la gestion de cette équipe.
Source : apiedoeuvre.fr
